LCA – Chapitre 8.2


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« Il y a environ cinq ans, je suppose. »

Yu Li miaule en réponse.

« À cette époque-là, tu étais déjà aveugle?  »

« Mm. »

Les deux pattes avant de Yu Li commencent à remuer dans tous les sens.

« Ça veut dire que tu as perdu la vue il y a cinq ans de cela? »

La concubine aveugle penche la tête pour y réfléchir: « Je pense que c’est arrivé encore plus tôt, il y a presque sept ans. »

Yu Li se tortille avec impatience et la concubine aveugle se précipite de le retenir encore plus fermement afin de lui éviter de tomber. Plus il serre son emprise sur Yu Li, plus ce dernier se débat pour s’échapper.

L’empereur ferme son éventail et dit, « Il se fait tard, je dois y aller. »

« Ah, oui, » la concubine aveugle se lève, « Soyez prudent sur le chemin du retour. »

Profitant de cette occasion, Yu Li se libère de ses bras et disparaît en un éclair.

La concubine aveugle soupire: « Il est de nouveau désobéissant. »

L’empereur sourit et dit, « Les chats sont tous comme ça. »

« C’est ce qui m’inquiète d’autant plus », répond la concubine aveugle, « Même s’il se met dans de sales draps, je ne peux pas supporter de lui crier dessus. Il m’est beaucoup trop précieux. »

Les doigts de l’empereur caressent la poignée de son éventail, ses yeux fins se retroussent et il dit, « oui ».

La concubine aveugle escorte l’empereur hors de la cour et n’oublie pas de l’avertir: « Lorsque vous retournez au palais, vous devez faire très attention. »

L’empereur lui demande alors: « Attention à quoi? »

La concubine aveugle pince ses lèvres et baisse la tête pour continuer: « Être en compagnie du souverain, c’est comme accompagner d’un tigre. »

L’empereur fronce légèrement les sourcils, « L’empereur est-il si terrible que ça? »

La concubine aveugle agrippe fermement ses manches et acquiesce, « mm ».

L’empereur plisse les yeux, il dit alors que sa voix baisse de plusieurs tonalités, « Pourquoi dites-vous cela? Vous n’avez jamais vu l’empereur. »

« Je l’ai vu. »

« … quoi? »

La tête de la concubine aveugle s’abaisse encore plus, le bout de son nez touchant presque sa chemise, « Soyez plus prudent. Ne parlez pas, ne regardez pas, fais seulement bien votre travail. Je-j’espère que vous me visiterez souvent.  »

L’empereur n’est pas encore sorti de sa stupeur, mais quand il reprend ses sens, sa prochaine question se perd dans sa gorge puisque la concubine aveugle s’est déjà retourné et parti.

Xiao Bao est en train de nettoyer le service à thé. Voyant son maître revenir tout seul, il lui demande nonchalamment: « Où est le garde? »

La concubine aveugle lui répond: « Il est déjà parti. »

Xiao Bao émet donc un simple son: « Oh. »

Les pupilles grises de la concubine aveugle reposent sur Xiao Bao, puis il lui demande soudainement: « Me cacherais-tu quelque chose récemment? »

Le cœur de Xiao Bao se serre, le plateau en bois de santal menace même de glisser presque de ses doigts pour s’écraser sur le sol.

« Pourquoi Maître penserait-t-il ainsi? »

La concubine aveugle sourit sciemment, « Ce garde qui vient ici ces derniers jours n’est pas vraiment un garde, n’est-ce pas? »

« Comment avez-vous deviné? »

La dernière syllabe qu’il prononce est quelque peu tremblante.

La concubine aveugle lève un sourcil et dit, « Les règles du palais sont strictes. Ce n’est pas si facile d’aller et venir ici à sa guise, ni de se prélasser et de prendre le temps de boire du thé. De plus, quel genre de garde portrait avec lui un éventail? »

Xiao Bao marmonne, « Ah… »

La concubine aveugle met ses bras sur sa taille et commence à faire les cent pas dans la cour: « Même si je ne peux pas voir, mes oreilles demeurent sensibles. Je peux entendre le bruit de son éventail, à chaque fois qu’il l’ouvre, le ferme et le secoue. »

Xiao Bao réplique avec précaution: « J’ai seulement remarqué que ses vêtements ne sont pas d’humble qualité. Il ne semble pas être une mauvaise personne, donc je n’ai rien dit. Peut-être n’est-il que c’est un seigneur qui se plait à visiter le palais. »

La concubine aveugle s’arrête, « Il n’est pas de la petite noblesse. »

Le cœur de Xiao Bao commence à palpiter et il essaie tant bien que mal de le calmer, en rétorquant, « Quel genre de personne pensez-vous qu’il est, maître? »

La concubine aveugle pince les lèvres. « Tu te souviens du thé que tu as préparé plus tôt? »

« Mm. »

« C’était un tribut. »

Xiao Bao devient choqué, « Un tribut? »

« Mm, » la concubine aveugle acquiesce, « Ce thé a été produit à Dong Ting Junshan. Ses feuilles ont la forme d’aiguilles, donc elles sont appelés aiguille d’argent Junshan. S’ils c’était des feuilles de thé en forme d’aiguille d’argent régulières, alors cela ne voudrait rien dire, mais le thé que j’ai bu aujourd’hui était un thé noir de Junshan. Il a une texture très fine. Aucun petit seigneur n’aurait pu s’en procurer.  »

Xiao Bao chuchote: « Cela veux donc dire… »

La concubine aveugle sourit, « Peut-être que c’est un prince influent. »

Xiao Bao s’exclame doucment, « Ah ».

« Même s’il n’est pas en train de me dit pas la vérité, je ne le blâme pas », la concubine aveugle baisse les yeux, ses cils tremblent légèrement, « Au sein de la famille impériale, il y a toujours des choses qui ne peuvent pas être dévoilées. Je serais satisfait t’ant qu’il viendra me faire la conversation.  »

Xiao Bao répond: « Oui. »

La concubine aveugle demeure silencieux pendant un instant. Ce n’est qu’après un long moment qu’il reprend: « J’espère que rien ne va lui arriver, vu que sa position est proche de l’empereur. »

Xiao Bao le rassure: « Ne vous inquiètez pas, rien ne peut lui arriver. »

Le regard de la concubine aveugle est indistinct, ses yeux vides, comme s’il était profondément plongé dans ses souvenirs.

Après un long moment, il soupire et dit,

« Nous ne pouvons qu’espérer. »


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